Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Nous contacter

Section Daniel MAYER Canton de Mundolsheim
Fédération du Bas Rhin du Parti Socialiste
8 rue Saint-Ehrard - 67100 Strasbourg
Courriel : ps.mundolsheim@gmail.com

Recherche

Archives

31 août 2011 3 31 /08 /août /2011 06:23

 

allocation-adulte-handicap

 

La réforme de la dépendance des personnes âgées, qui devait être l'un des grands chantiers du quinquennat de Nicolas Sarkozy, est une nouvelle fois reportée, à "début 2012" au moins, a annoncé François Fillon le 24 août, ce qui réduit la possibilité de mener cette réforme avant la présidentielle.

« Traiter ce dossier dans le contexte économique et financier que nous connaissons aujourd’hui, dans l’urgence, ne serait pas responsable », a estimé mercredi 24 août 2011 le Premier ministre François Fillon en présentant son plan d’austérité. « Il nous faudra trouver des ressources adaptées, nous devons y travailler encore d’ici le début de l’année 2012″, a-t-il ajouté.

Calendrier trop serré – Attendue depuis la canicule de 2003, la réforme de la prise en charge des personnes âgées a été plusieurs fois repoussée depuis, alors même que Nicolas Sarkozy en a fait dès 2007 l’un de ses grands chantiers.

Enfin lancée début 2011, la réforme devait déboucher sur des mesures en juillet. Mais ces annonces avaient été reportées à septembre. Dès le printemps, la ministre des Solidarités Roselyne Bachelot avait pourtant promis des « mesures d’urgence », représentant un milliard d’euros, qui devaient figurer dans le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2012, débattu à l’automne. Mais, déjà, l’idée d’une remise à plat de toutes les aides aux personnes âgées et d’une réforme de fond de la qualité de la prise en charge avait été reportée à l’après présidentielle, tant le calendrier était serré.

Désormais, le calendrier se resserre encore, jetant l’incertitude sur les fameuses mesures d’urgence, qui devaient aider les familles à faire face aux dépenses et soutenir les départements qui ont du mal à payer les prestations aux aînés, ou encore aider les services d’aide à domicile.

Pour Henri Sterdyniak, économiste à l’OFCE, « il est évident que la dépendance ne sera pas traitée avant la présidentielle. La France n’a aucune raison d’annoncer aujourd’hui des dépenses futures qui inquièteraient les marchés », ajoute l’économiste, qui estime que même les mesures d’urgence ne seront pas prises avant l’élection.

Mauvaise nouvelle - « C’est une mauvaise nouvelle pour les familles et pour les départements », qui financent notamment l’Allocation personnalisée d’autonomie, estime le président de l’Assemblée des départements de France (ADF) Claudy Lebreton. La dépendance « n’est clairement pas une priorité pour le gouvernement », insiste-t-il.

L’AD-PA, association de directeurs de maisons de retraite et de services à domicile, juge « ce nouveau report extrêmement dommageable », qui risque d’entraîner « des suppressions d’emplois dans les services à domicile en fragilité financière et dans les établissements. »

« Déception » aussi pour la Fnaqpa (établissements et services), qui « craint qu’à force de prendre son temps à résoudre les problèmes qui se poseront en 2030, le gouvernement ne sacrifie les personnes âgées aujourd’hui fragilisées. »

Le Synerpa (maisons de retraite privées) est également « déçu » et son président Jean-Alain Margarit est lui aussi « persuadé qu’il n’y aura rien avant la présidentielle » même s’il « comprend » les difficultés budgétaires.

Quelles ressources – Autre écueil, les mesures d’austérité annoncées mercredi réduisent encore les marges de manoeuvre du gouvernement, qui devra trouver de nouvelles ressources. Ainsi par exemple, la taxation des revenus du patrimoine, un temps évoquée pour financer la dépendance, sera utilisée pour réduire les déficits.

Toutefois, note Henri Sterdyniak, le gouvernement n’a pas touché à une autre piste possible : la hausse de la CSG des retraités, laissant ainsi une « petite ressource aux gouvernements futurs ».

 

Approfondir le sujet


Lire le dossier l Tout savoir sur la réforme de la dépendance

 

Sur la Gazette Santé social

Partager cet article
Repost0
31 août 2011 3 31 /08 /août /2011 06:23

 

allocation-adulte-handicap

 

La réforme de la dépendance des personnes âgées, qui devait être l'un des grands chantiers du quinquennat de Nicolas Sarkozy, est une nouvelle fois reportée, à "début 2012" au moins, a annoncé François Fillon le 24 août, ce qui réduit la possibilité de mener cette réforme avant la présidentielle.

« Traiter ce dossier dans le contexte économique et financier que nous connaissons aujourd’hui, dans l’urgence, ne serait pas responsable », a estimé mercredi 24 août 2011 le Premier ministre François Fillon en présentant son plan d’austérité. « Il nous faudra trouver des ressources adaptées, nous devons y travailler encore d’ici le début de l’année 2012″, a-t-il ajouté.

Calendrier trop serré – Attendue depuis la canicule de 2003, la réforme de la prise en charge des personnes âgées a été plusieurs fois repoussée depuis, alors même que Nicolas Sarkozy en a fait dès 2007 l’un de ses grands chantiers.

Enfin lancée début 2011, la réforme devait déboucher sur des mesures en juillet. Mais ces annonces avaient été reportées à septembre. Dès le printemps, la ministre des Solidarités Roselyne Bachelot avait pourtant promis des « mesures d’urgence », représentant un milliard d’euros, qui devaient figurer dans le projet de budget de la Sécurité sociale pour 2012, débattu à l’automne. Mais, déjà, l’idée d’une remise à plat de toutes les aides aux personnes âgées et d’une réforme de fond de la qualité de la prise en charge avait été reportée à l’après présidentielle, tant le calendrier était serré.

Désormais, le calendrier se resserre encore, jetant l’incertitude sur les fameuses mesures d’urgence, qui devaient aider les familles à faire face aux dépenses et soutenir les départements qui ont du mal à payer les prestations aux aînés, ou encore aider les services d’aide à domicile.

Pour Henri Sterdyniak, économiste à l’OFCE, « il est évident que la dépendance ne sera pas traitée avant la présidentielle. La France n’a aucune raison d’annoncer aujourd’hui des dépenses futures qui inquièteraient les marchés », ajoute l’économiste, qui estime que même les mesures d’urgence ne seront pas prises avant l’élection.

Mauvaise nouvelle - « C’est une mauvaise nouvelle pour les familles et pour les départements », qui financent notamment l’Allocation personnalisée d’autonomie, estime le président de l’Assemblée des départements de France (ADF) Claudy Lebreton. La dépendance « n’est clairement pas une priorité pour le gouvernement », insiste-t-il.

L’AD-PA, association de directeurs de maisons de retraite et de services à domicile, juge « ce nouveau report extrêmement dommageable », qui risque d’entraîner « des suppressions d’emplois dans les services à domicile en fragilité financière et dans les établissements. »

« Déception » aussi pour la Fnaqpa (établissements et services), qui « craint qu’à force de prendre son temps à résoudre les problèmes qui se poseront en 2030, le gouvernement ne sacrifie les personnes âgées aujourd’hui fragilisées. »

Le Synerpa (maisons de retraite privées) est également « déçu » et son président Jean-Alain Margarit est lui aussi « persuadé qu’il n’y aura rien avant la présidentielle » même s’il « comprend » les difficultés budgétaires.

Quelles ressources – Autre écueil, les mesures d’austérité annoncées mercredi réduisent encore les marges de manoeuvre du gouvernement, qui devra trouver de nouvelles ressources. Ainsi par exemple, la taxation des revenus du patrimoine, un temps évoquée pour financer la dépendance, sera utilisée pour réduire les déficits.

Toutefois, note Henri Sterdyniak, le gouvernement n’a pas touché à une autre piste possible : la hausse de la CSG des retraités, laissant ainsi une « petite ressource aux gouvernements futurs ».

 

Approfondir le sujet


Lire le dossier l Tout savoir sur la réforme de la dépendance

 

Sur la Gazette Santé social

Partager cet article
Repost0
29 août 2011 1 29 /08 /août /2011 10:30

senat_494-copie-1.jpg

 

Pour la première fois dans l'histoire de la Ve République, la gauche a une chance de remporter la majorité au Sénat à l'occasion des élections sénatoriales du 25 septembre, huit mois avant le scrutin présidentiel de 2012.


Pour les socialistes, une victoire au Sénat, huit mois avant la présidentielle, aurait un impact psychologique très important. Elle compliquerait par ailleurs les choses pour le gouvernement, pour faire passer les derniers textes de la fin du quinquennat, puisqu'il ne bénéficierait plus de la majorité dans les deux chambres.
"La possibilité de faire basculer le Sénat à gauche est bien réelle", a déclaré le secrétaire national du PS aux élections, Christophe Borgel, alors que pour le président de la Haute Assemblée, Gérard Larcher (UMP), sa majorité conservera sept à douze sièges d'avance, voire "peut-être plus".

23 sièges à emporter
"C'est une bataille qui sera serrée", a poursuivi M. Borgel, qui s'est déclaré "un peu étonné" des chiffres avancés par M. Larcher. Le président du Sénat avait dit que "pour l'emporter, il (fallait) que la gauche fasse basculer 32 sièges".

Pour M. Borgel, il suffira seulement d'un gain de 22 à 23 sièges à la gauche pour ravir à la droite le Sénat et sa présidence. Un objectif qu'il juge parfaitement atteignable dans la mesure où, lors des dernières élections sénatoriales en 2008, la gauche avait gagné 23 sièges, alors qu'un tiers des sièges était renouvelé. "Cette année, la moitié des sièges sont renouvelés et l'objectif d'un gain identique est réaliste".

Actuellement, sur un effectif de 343 sénateurs, la gauche détient 153 sièges : 116 sénateurs sont inscrits au groupe PS et Verts et 24 au groupe Communistes, républicains et citoyens. Elle peut aussi compter sur 13 des 17 membres du groupe Rassemblement démocratique et social européen (RDSE). 29 sénateurs font partie du groupe Union centriste, qui rassemble le MoDem, le Nouveau centre, l'Alliance centriste. 149 sont inscrits comme UMP, 7 sont non inscrits, et un siège est vacant.


71.890 grands électeurs


Quelque 71.890 grands électeurs désigneront le 25 septembre 170 sénateurs et porteront à cette occasion leur nombre de 343 à 348, pour tenir compte des évolutions démographiques.
Les grands électeurs sont constitués des conseillers généraux, des conseillers régionaux, des députés, et des délégués des conseils municipaux qui constituent à eux seuls 95% du collège électoral. Le Sénat est désormais renouvelable par moitié tous les trois ans.
Dans les départements élisant trois sénateurs ou moins, l'élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours.
Dans ceux élisant plus de trois sénateurs, l'élection a lieu à la proportionnelle à la plus forte moyenne. Trois ministres sont candidats, les UMP Chantal Jouanno (Sports) à Paris et Gérard Longuet (Défense) dans la Meuse, et le Nouveau Centre Maurice Leroy (Ville) en Loir-et-Cher.

 

170 sièges à renouveler


Les sénateurs qui seront désignés représenteront les départements dont l'ordre numérologique va de l'Indre-et-Loire aux Pyrénées-Orientales, les départements de l'Ile-de-France, la Guadeloupe, la Martinique, la Réunion, la Nouvelle-Calédonie, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon et les Français de l'étranger (six sénateurs).
Les sénateurs représentant les Français établis hors de France sont élus par les membres de l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE).

Voici la liste des 44 départements et des collectivités concernés par les élections sénatoriales du 25 septembre, avec entre parenthèses le nombre de sièges, 170 en tout, à pourvoir:


L'ensemble des départements compris entre l'Indre-et-Loire et les Pyrénées-Orientales :


Indre-et-Loire (3), Isère (5), Jura (2), Landes (2), Loir-et-Cher (2), Loire (4), Haute-Loire (2), Loire-Atlantique (5), Loiret (3), Lot (2), Lot-et-Garonne (2), Lozère (1), Maine-et-Loire (4), Manche (3), Marne (3), Haute-Marne (2), Mayenne (2), Meurthe-et-Moselle (4), Meuse (2), Morbihan (3), Moselle (5), Nièvre (2), Nord (11), Oise (4), Orne (2), Pas-de-Calais (7), Puy-de-Dôme (3), Pyrénées-Atlantiques (3), Hautes-Pyrénées (2), Pyrénées-Orientales (2).


Les 8 départements de l'Ile-de-France :


Paris (12), Essonne (5), Hauts-de-Seine (7), Seine-Saint-Denis (6), Val-de-Marne (6), Val-d'Oise (5), Seine-et-Marne (6), Yvelines (6)


En outremer :


Guadeloupe (3), Martinique (2), La Réunion (4), Nouvelle-Calédonie (2), Mayotte (2), Saint-Pierre-et-Miquelon (1).

A cela s'ajoutent 6 des 12 sénateurs représentant les Français établis hors de France.

A noter que 5 départements et collectivités éliront un sénateur de plus : Isère, Maine-et-Loire, Oise, Réunion, Nouvelle-Calédonie.

 

Sur Le courrier des maires .fr

Partager cet article
Repost0
24 août 2011 3 24 /08 /août /2011 16:34

 

 

 

Le sénateur (UMP) Pierre Hérisson a remis, le 28 juillet 2011, son rapport "Gens du voyage : vers un statut de droit commun" au Premier ministre. Le président de la Commission nationale consultative des gens du voyage y formule 24 propositions qui s'efforcent de concilier les attentes des élus et celles des associations de gens du voyage.

"Si le gouvernement ne prend pas l'initiative de déposer un projet de loi, je ferai moi-même une proposition de loi dès l'automne", a déclaré le sénateur . Il insiste sur la nécessité d'aboutir rapidement à une clarification de lois qui, selon lui, ne sont plus adaptées à la réalité. Les associations de gens du voyage préfèreraient, elles, une révision de la loi Besson et des titres de circulation après l'élection présidentielle de 2012, pour que les débats puissent se dérouler dans la sérénit


Un seul texte... et le droit commun


Pierre Hérisson préconise dans son rapport une révision de la loi du 5 juillet 2000 sur l'accueil et l'habitat des gens du voyage et de la loi du 3 janvier 1969 sur les titres de circulation et les activités ambulantes.
Selon lui, les dispositions spécifiques aux gens du voyage devraient être regroupées dans un seul texte, tandis que "tout le reste, qui fait l'essentiel de la vie sociale, les droits civiques, les droits sociaux, l'école..." relèverait du droit commun.

Le sénateur propose, notamment
- de supprimer le délai de trois ans imposé aux gens du voyage pour pouvoir voter.
- de rendre facultatifs les titres de circulation,
- de généraliser la carte d'identité, tout en maintenant le principe d'une commune de rattachement pour ceux qui n'ont pas de propriétés ou de terrains en location, qui seraient alors domiciliés à cette adresse fixe, les autres relevant d'une domiciliation dans une association ou un CCAS.
- de tenir compte des terrains familiaux dans les documents d'urbanisme...


Les gens du voyage réservés


Pierre Hérisson souhaite un renforcement du rôle de l'Etat dans la gestion des grands passages et un transfert de la compétence "aires d'accueil" aux EPCI, en demandant que chaque place soit comptabilisée dans la loi SRU en tant que logement social.

Sur ce point particulier, des responsables d'associations demandent la prudence. « Il ne faudrait pas que cette mesure serve de prétexte à certains maires pour ne pas faire les logements sociaux dont les plus pauvres ont besoin, qu'ils n'aient à choisir entre les emplacements pour nous et les logements pour les autres », souligne Milo Delage, président de France liberté voyage, association membre de l'Union française des associations tsiganes.


O. Berthelin sur La Gazette.fr

Partager cet article
Repost0
22 août 2011 1 22 /08 /août /2011 12:43

 


Les chiffres de la désindustrialisation et ce qu'ils ne montrent pas.

 

 

Les chiffres qu'on considère habituellement comme ceux de la désindustrialisation de la France, ne nous disent sûrement pas tout sur ce phénomène, mais ils en disent beaucoup, et parfois des choses assez inattendues. Comme les ruines laissées par un empire disparu, les chiffres sont des objets sans vie qui ont été engendrés par de la vie, qui ne disent pas tout sur elle, mais qui sont porteurs de beaucoup d'informations à son sujet, parfois étonnantes.


La réduction depuis 1980, de la part qui est celle de l'activité industrielle, dans la valeur ajoutée de toutes nos activités, ainsi que la réduction du nombre d'emplois mobilisés chez nous par cette activité industrielle, sont de bonnes mesures de l'ampleur de ce phénomène de désindustrialisation.

L'observation détaillée de l'évolution depuis 1980, de la balance des paiements de la France, nous dit ce qu'il en est des équilibres et déséquilibres entre les flux économiques entrants et sortant de notre pays, concernant les échanges de biens manufacturés, et plus globalement concernant les échanges de biens et services, et les autres opérations courantes qui ne sont pas des mouvements de capitaux. Concernant enfin les mouvements de capitaux vers l'étranger ou venus de l'étranger : placements ou prêts, mais aussi investissements directs faits par des entreprises qui s'agrandissent ou se déplacent dans de nouveaux territoires.

Incidemment, l'observation de ces chiffres pourra nous aider à comprendre comment est possible ce « miracle », par lequel notre balance des paiements reste globalement en équilibre (nos réserves de change restent à peu près au même niveau), tout en étant en déficit sur les échanges commerciaux et autres opérations courantes, ainsi que sur les investissements directs et autres mouvements de capitaux, hormis les achats de titres négociables de notre dette publique par des résidents du reste du monde. L'explication n'est peut-être pas sans rapport avec la crise des dettes publiques négociables sur les marchés financiers, qui frappe aujourd'hui les pays de la zone euro.

Dans un prochain texte je parlerai de tout ce que les chiffres habituels de la désindustrialisation ne montrent pas, mais ici d'abord, je donne ces chiffres, dans 7 graphiques. 

 

L'évolution de l'ampleur de l'activité industrielle en France.


Les graphiques 1 et 2 donnent l'évolution de l'ampleur de l'activité industrielle en France, entre 1980 et 2008. La source de ces graphiques est l'OCDE. Le graphique 1 donne l'évolution de la part de la valeur ajoutée de toutes les activités, faite par l'activité industrielle en France. La valeur ajoutée faite par une activité, est la valeur de sa production, à laquelle on retranche la valeur de ses consommations intermédiaires, c'est à dire de ce qu'elle a consommé pour produire ce qu'elle a produit. On voit qu'en 1980, l'activité industrielle faisait 18% de la valeur ajoutée de toutes les activités. Tandis qu'en 2008, elle n'en fait plus que 9,8%

 

Graphique 1. Évolution de la part de la valeur ajoutée faite par l'activité industrielle, entre 1980 et 2008, en France, en pourcentage.


Le graphique 2 donne l'évolution du nombre d'emplois mobilisés par l'activité industrielle en France. On y voit qu'en 1980, l'activité industrielle mobilisait 4,5 millions d'emplois, et qu'elle n'en mobilise plus que 2,6 millions en 2008 : ce qui fait une disparition de 1,9 millions d'emplois.

 

Graphique 2. Évolution du nombre d'emplois mobilisés par l'activité industrielle en France, entre 1980 et 2008, en millions.


L'évolution globale de la balance des paiements de la France.


Les graphiques 3 à 7 donnent l'évolution de la balance des paiements de la France entre 1980 et 2008. La source principale de ces graphiques est laBanque de France. La balance des paiements recense les montants des paiements, par lesquels de l'argent a été transféré d'un compte à l'intérieur du pays vers un compte à l'extérieur (sortie d'argent), ou bien d'un compte à l'extérieur vers un compte à l'intérieur (entrée d'argent). Le solde de la balance des paiements est égal au montant des entrées de monnaie dans le pays, auquel on retranche le montant des sorties de monnaie. Quand il y a plus de monnaie qui rentre que de monnaie qui sort du pays, les réserves de change, c'est à dire de monnaie étrangère du pays, s'accroissent. Et inversement, quand il y a plus de monnaie qui sort que de monnaie qui rentre dans le pays, ses réserves de change se réduisent. Ainsi le solde global de la balance des paiements est égal à la variation des réserves de change du pays. 

Le graphique 3 donne d'abord l'évolution globale du solde de la balance des paiements de la France : sur les « opérations courantes », sur les « mouvements de capitaux », et sur les paiements de toutes catégories. Les opérations courantes sont les paiements qui sont suscités par les échanges commerciaux entre les acteurs de l'économie, et plus marginalement, par des dons d'argent que se font des individus et des pays, par des transferts d'argent que font des individus qui déménagent et des pays vers leurs ambassades, ou par des paiements de revenus par une entreprise d'un pays, pour le travail d'un individu résidant dans un autre pays. Les opérations courantes sont aussi les paiements suscités par l'état au moment où ils ont lieu, des stocks de capital et de leurs détenteurs : quelles actions ou entreprises, créances ou biens immobiliers, existent, et où, par qui ces actifs sont-ils possédés, et donc à qui rapportent-ils un revenu sous forme de dividende ou bénéfice, intérêt ou loyer, et enfin où résident ces détenteurs du capital. Cet état à un moment des stocks de capital et de leurs détenteurs, a pour conséquence des paiements de revenus par des entreprises, banques, ou gestionnaires d'épargne de tel ou tel pays, à des détenteurs de capital résidant dans tel ou tel autre pays.

Les mouvements de capitaux sont les paiements qui sont suscités par des acquisitions de capital. Ce sont les placements, sous forme d'achats d'actions ou d'obligations, par des banques et autres gestionnaires de capitaux issus de l'épargne. Ce sont aussi les prêts accordés par des banques. Et ce sont enfin des « investissements directs », c'est à dire des transferts d'argent effectués par des entreprises pour s'agrandir ou se déplacer : transferts d'argent vers des filiales qu'elles viennent de créer ou dont elles souhaitent poursuivre le développement, ou bien achats d'autres entreprises dans le but de les absorber.

On voit sur le graphique que de 1980 à 2008, sur les opérations courantes prises isolément, notre balance des paiements oscille entre excédent et déficit. Depuis 2003 nous sommes entrés dans une période de déficit sur les opérations courantes, qui s'accentue de plus en plus : en 2008 il représente 1,7% du PIB de la France. Mais ce déficit est compensé par un excédent de la balance des paiements sur les mouvements de capitaux. La balance des paiements reste donc globalement en équilibre, et n'exerce pas sur la valeur de notre monnaie par rapport aux autres, la pression à la baisse qu'elle exercerait si son solde global restait proche de son solde sur les opérations courantes. Une dépréciation de notre monnaie pourrait pourtant être utile pour améliorer notre compétitivité, et pour ainsi réduire notre déficit sur les opérations courantes.

 

Graphique 3. Évolution du solde de la balance des paiements de la France, sur les opérations courantes, sur les mouvements de capitaux, et sur les paiements de toutes catégories, entre 1980 et 2008, en pourcentage du PIB de la France.


L'évolution de la balance des paiements de la France sur les mouvements de capitaux.


Le graphique 4 donne l'évolution du solde de notre balance des paiements, sur les mouvements de capitaux. Ce graphique a pour source secondaire l'OCDE. Parmi les mouvements de capitaux, il y a les investissements directs. Si une entreprise utilise de l'argent qu'elle détient dans le pays pour s'agrandir ou se déplacer à l'étranger, il y a sortie d'argent, et si elle utilise de l'argent qu'elle détient à l'étranger pour s'agrandir ou se déplacer dans le pays, il y a entrée d'argent. D'autres mouvements de capitaux sont les placements et prêts. Lorsque de l'argent est placé ou prêté à l'étranger par un résident du pays, il y a sortie d'argent. Et lorsque l'argent est placé ou prêté à un résident du pays par l'étranger, il y a entrée d'argent.

On voit sur ce graphique que, sur les investissements directs et les placements et prêts autres que des achats de titres négociables de dette publique française (par des résidents de l'étranger), notre balance des paiements est en fait le plus souvent en déficit, particulièrement depuis 1996. Entre 1996 et 2008, le déficit cumulé sur ces deux catégories de mouvements de capitaux est en moyenne, chaque année, de 3,7% de notre PIB, soient l'équivalent par rapport à notre PIB de 2008, de 72,1 milliards d'euros par an. En 2008, ce déficit vaut plus que sa moyenne sur cette grosse décennie : il vaut 4,9% de notre PIB, soient 94,7 milliards d'euros. C'est en fait l'endettement de l'État français par rapport aux résidents de l'étranger, qui compense cette impressionnante fuite des capitaux. Cet endettement de notre État par rapport aux résidents de l'étranger permet ainsi à notre balance des paiements d'avoir, sur les mouvements de capitaux, un excédent qui compense son déficit sur les opérations courantes, et qui lui permet finalement de rester globalement en équilibre, sur toutes les catégories de paiements. Depuis 1996, l'État français s'endette chaque année par rapport aux résidents de l'étranger, d'un montant annuel de plus en plus important : de 1% de notre PIB en 1996, et de 6,2% de notre PIB en 2008, soient alors 119,9 milliards d'euros.

 

Graphique 4. Évolution du solde de la balance des paiements de la France, sur les mouvements de capitaux, entre 1980 et 2008, en pourcentage du PIB de la France.


Dans un récent article paru sur la version internet du journal Le Monde, portant sur l'endettement de l'État français par rapport à l'étranger, cet endettement est présenté au lecteur comme « une preuve de l'attractivité du territoire national ». Mais à voir le déficit actuel de notre balance des paiements sur les opérations courantes (et aussi comme on le verra, sur les échanges commerciaux pris isolément des autres opérations courantes), on pourrait avoir l'impression que les consommateurs se détournent un peu trop de la production française, sûrement trop couteuse à leur goût à cause du coût du travail chez nous et de la surévaluation de l'euro. Et à voir le déficit actuel sur les investissements directs et placements et prêts, hormis titres négociables de notre dette publique, on pourrait aussi avoir l'impression que les investisseurs se détournent beaucoup des rendements de l'activité française, sûrement trop réduits à leur goût, par le cout du travail dans notre pays. L'endettement de notre État peut donc plutôt nous apparaître comme le « truc » de ce « tour de magie », par lequel notre pays parvient à avoir une monnaie surévaluée, une balance des paiements en déficit sur les opérations courantes et sur les mouvements de capitaux hormis les achats de titres de dette publique locale, et pourtant une balance des paiements globalement en équilibre.

 

L'évolution de la balance des paiements de la France sur les opérations courantes.


Les graphiques 5 et 6 donnent le détail de l'évolution de la balance des paiements de la France, sur les opérations courantes. Parmi les opérations courantes, il y a les échanges commerciaux de biens, mais aussi de services (tourisme, transports aériens, maritimes ou routiers, services à distance aux entreprises et aux ménages...). Les biens échangés peuvent être des biens « naturels agricoles ou énergétiques de plein air » (biens agricoles, issus de l'élevage ou de la pêche, alimentaires, eau, gaz, électricité), ou des biens « naturels miniers ou énergétiques extraits des sous-sols » (métaux, charbon, uranium, pétrole brut ou raffiné), ou encore des biens « manufacturés » (textile, meubles, accessoires de maison, produits chimiques, machines, appareils électriques, appareils de transport...). Une exportation suscite une entrée d'argent (le paiement du bien exporté), alors qu'une importation suscite une sortie d'argent. Et un service fourni par un acteur du pays à un acteur de l'étranger suscite une entrée d'argent, alors qu'un service fourni par un acteur de l'étranger à un acteur du pays suscite une sortie d'argent.

D'autres opérations courantes sont les « transferts courants des ménages et administrations », par lesquels un individu ou une administration, transfère de la monnaie du pays où il réside vers un autre pays, afin par exemple de s'établir dans cet autre pays, ou bien de faire un don à un acteur résident dans cet autre pays. Par exemple, un travailleur résidant dans un autre pays que le sien, envoyant de l'argent à sa famille, ou bien un État accordant une aide au développement. Il y a encore les « paiements de revenus au travail », par lesquels une entreprise résidant dans un pays, paie le travail d'un individu qui réside dans un autre pays. 
Et puis il y a les « paiements de revenus au capital » : par lesquels une filiale d'une entreprise résidant dans un pays, transfère des dividendes à l'entreprise mère, résidant dans un autre pays, pour que celle-ci les distribue à ses actionnaires (revenus des investissements directs). Ou bien par lesquels un acteur résidant dans un pays paie des dividendes, ou des intérêts, à un acteur résidant dans un autre pays, qui lui a accordé un prêt, ou qui a placé son argent sous forme d'actions ou d'obligations qu'il lui a acheté (revenus des placements et prêts).

Le graphique 5 donne d'abord l'évolution des taux « d'ouverture » économique de la France, sur diverses catégories d'opérations courantes. Ce graphique a pour source secondaire l'OMC. Le taux d'ouverture d'un pays sur une catégorie d'opérations courantes, est le pourcentage de son PIB, que représente la moyenne des montants des opérations de cette catégorie suscitant une entrée d'argent, et des montants des opérations de cette catégorie suscitant une sortie d'argent. Alors que les différents soldes de la balance des paiements indiquent les équilibres ou déséquilibres entre flux entrants et sortants, les taux d'ouverture sont une mesure de l'ampleur de ces flux entre un pays et le reste du monde.

Sur le graphique on voit qu'entre 1980 et 2008, les flux « courants » entre la France et le reste du monde se sont globalement amplifiés, passant de 2,6% à 8,3% sur les revenus du capital, de 11,1% à 17,5% sur les échanges de biens manufacturés, de 22,1% à 28,7% sur les échanges commerciaux de toutes catégories de biens et services, et de 24% à 37% sur l'ensemble des opérations courantes. La brusque chute de la courbe du taux d'ouverture en 1995, sur les revenus du capital, est peut-être due à une modification du mode de recensement de ces flux par la Banque de France à partir de cette année là. Les échanges de biens manufacturés, qui représentaient la moitié du montant de nos échanges commerciaux en 1980, en représentent les 3 cinquièmes en 2008. Et pendant toute la période ils représentent aussi un peu moins de la moitié des montants des opérations courantes. Le taux d'ouverture sur les échanges de biens naturels extraits des sous-sols s'est d'abord réduit jusqu'en 1995, passant de 3,7% à 0,8%, puis il a recommencé à monter pour atteindre 3,3% en 2008.

 

Graphique 5. Évolution des taux d'ouverture de la France sur diverses catégories d'opérations courantes, entre 1980 et 2008, en pourcentage.


Le graphique 6 donne l'évolution du solde de notre balance des paiements sur les opérations courantes. Il a pour source secondaire l'Agence France Trésor. On voit sur ce graphique que notre balance des paiements garde, sur les transferts courants, un déficit d'une importance moyenne, grandement dû aux aides au développement : ce déficit est de 0,8% du PIB français en 2008. Elle a aussi un déficit de plus en plus prononcé, sur les paiements d'intérêts par l'État français, à des détenteurs résidant à l'étranger, de titres négociables de dette publique (l'essentiel aujourd'hui des titres de dette publique sont négociables sur les marchés financiers) : ces intérêts représentent 1,4% du PIB français en 2008, soient 27,2 milliards d'euros. Notre balance des paiements a par contre des excédents de plus en plus élevés, sur les revenus du capital autres que ceux des titres de dette publique française. Ces excédents représentent en 2008, 1,3% du PIB français pour les revenus des investissements directs, et encore 1,3% pour les placements et prêts autres que les titres de la dette publique française : ce qui fait en tout 2,6% du PIB français, soient 51,1 milliards d'euros. Enfin, sur les échanges commerciaux, notre balance des paiements qui a longtemps été en équilibre voire en excédent depuis 1983, est entrée depuis 2005 dans une période de déficit de plus en plus accentué : qui est en 2008 de 2,2% du PIB français.

 

Graphique 6. Évolution du solde de la balance des paiements de la France, sur les opérations courantes, entre 1980 et 2008, en pourcentage du PIB de la France.


Chercher à réduire notre déficit sur les opérations courantes, en agissant sur les transferts courants, ou bien sur les revenus du capital hors revenus payés à l'étranger sur la dette publique française, ne paraît pas une très bonne idée. Pour réduire notre déficit sur les transferts courants, il nous faudrait surtout réduire nos aides au développement. Quant aux revenus du capital à l'étranger détenu par des résidents de France, ils sont très chers payés, et ne s'obtiennent pas très rapidement. Ils sont en effet un pourcentage, valant au mieux 15%, et souvent beaucoup moins, d'un investissement direct, placement ou prêt à l'étranger. Il existe sûrement des manières plus efficaces d'utiliser de telles quantités d'argent directement investi, placé ou prêté à l'étranger, pour réduire notre déficit sur les opérations courantes, et aussi lutter contre le chômage de masse, la stagnation, la faiblesse des investissements, et les inégalités de revenus en France.

La réduction de la part de la dette publique détenue par des résidents étrangers, paraît par contre une bonne manière de lutter contre notre déficit sur les opérations courantes. Cette manière risque quand même de ne pas suffire à elle seule, puisque le paiement d'intérêts aux détenteurs de l'étranger de notre dette publique négociable, ne représente qu'une petite partie de nos opérations courantes. Cette manière risque aussi d'être assez lente pour obtenir des résultats, si elle consiste à réduire nos ventes futures de titres de dette à des résidents étrangers : il faudrait alors honorer les titres de dette présents jusqu'à ce qu'ils prennent fin.

Il reste à voir s'il serait facile ou non d'améliorer notre solde sur les échanges commerciaux. Si une telle amélioration était relativement facile, elle serait aussi assez efficace pour réduire notre déficit sur les opérations courantes de toutes catégories, puisque les échanges commerciaux représentent la grande majorité de nos opérations courantes.

 

L'évolution de la balance des paiements de la France sur les échanges commerciaux.


Le graphique 7 donne l'évolution du solde de notre balance des paiements sur les échanges commerciaux. Il a pour source secondaire l'OMC. On y voit que, sur les échanges de services et sur les échanges de biens naturels de plein air, notre balance des paiements garde un excédent d'une importance moyenne : en 2008, ces excédents sont respectivement de 0,9% et 1% de notre PIB. Sur les échanges de biens naturels extraits des sous-sols, notre balance des paiements a par contre un déficit, qui s'était réduit jusqu'à 0,5% de notre PIB en 1995, pour s'agrandir à nouveau depuis et valoir en 2008, 3,1% de notre PIB. Sur les échanges de biens manufacturés, notre balance des paiements oscille entre déficit et excédent, et est depuis 2005 en déficit de plus en plus accentué : valant 1% de notre PIB en 2008.

 

Graphique 7. Évolution du solde de la balance des paiements de la France, sur les échanges commerciaux, entre 1980 et 2008, en pourcentage du PIB de la France.

 

Samuel sur Le retour de l'antique esprit de clan.com

Partager cet article
Repost0
22 août 2011 1 22 /08 /août /2011 12:06

 

Ce que les chiffres de la désindustrialisation ne montrent pas 
Ce serait aller bien vite en besogne, que de croire que les chiffres qu’on considère habituellement comme ceux de la désindustrialisation de la France, nous disent à eux seuls, et dans tous ses aspects, toute la réalité de ce phénomène. Comme les ruines laissées par un empire disparu, les chiffres sont des objets sans vie qui ont été engendrés par de la vie, qui contiennent des informations sur elle, mais qui ne permettront jamais de la connaître complètement.

Ces quelques chiffres indiquent qu'il y a eu dans les trois ou quatre dernières décennies, une réduction importante, et quasiment sans trêve, de l’activité industrielle en France, tant du point de vue des emplois qu'elle mobilise, que du point de vue de la part qui est la sienne dans la valeur ajoutée de toutes nos activités.

Ces chiffres indiquent aussi que lors de la période allant de 1980 jusqu'au début des années 1990, puis lors de la période allant du début des années 2000 jusqu'à 2008, notre balance des paiements a un déficit global sur les échanges commerciaux et les quelques autres opérations courantes qui ne sont pas des mouvements de capitaux. Ce déficit réapparu depuis le début des années 2000, s'accentue depuis de plus en plus.

Au sujet des mouvements de capitaux, les chiffres de notre balance des paiements indiquent aussi que, surtout depuis la fin des années 1990, il y a sensiblement plus d'entreprises locales qui font des investissements directs à l'étranger, que d'entreprises de l'étranger qui font des investissements directs en France. Il y a aussi depuis le début des années 2000, et hormis les achats de titres négociables de dette publique française par des résidents de l'étranger, sensiblement plus de résidents locaux qui placent ou prêtent de l'argent à des résidents de l'étranger, que de résidents de l'étranger qui placent ou prêtent de l'argent à des résidents locaux.

Ainsi, depuis la fin des années 1990, l'endettement de l'État français vis-à-vis du reste du monde croit à grande vitesse et atteint en 2008 des niveaux impressionnants.

Mais pour commencer, la désindustrialisation est parfois vue aussi, comme une sorte de maladie de l’économie française, la maintenant non seulement dans certains déficits de la balance des paiements, ou dans un certain endettement de son État vis-à-vis du reste du monde, mais aussi dans la stagnation et le chômage de masse. Or pourquoi donc un plan de relance de la croissance et de l’emploi en France, et de rééquilibrage de notre balance des paiements, devrait-il passer par une ré-industrialisation ?

Ensuite, le phénomène de désindustrialisation est parfois vu comme un transfert d'une partie importante de notre activité industrielle vers les pays émergents. Or qu'est-ce qui nous permet de dire que cette réduction de notre activité industrielle, n'est pas principalement due à une réduction de notre consommation (et de notre accumulation) de biens manufacturés, ou bien à une amélioration de nos techniques de production, nous permettant de produire autant pour moins cher et en mobilisant moins d’emplois ? Qu'est-ce donc qui nous permet de dire que, par rapport à cette éventuelle baisse de notre consommation, ou par rapport à cette amélioration de nos techniques de production, le phénomène de transfert, vaguement suggéré par notre balance des paiements sur les échanges de biens manufacturés et sur les mouvements de capitaux, a plus qu'un effet marginal sur la réduction de notre activité industrielle ?

La désindustrialisation peut encore être vue comme un phénomène de désolidarisation des français les uns par rapport aux autres, dans leur engagement dans une relation au reste du monde. Or qu'est-ce qui nous permet de dire que tous les français ne profitent ou pâtissent pas de la même manière, de la désindustrialisation ?

Enfin, la désindustrialisation est parfois vue comme une sorte de déclin, voire de « décadence » ou de « tiers-mondisation » de la France. Cette vision présuppose que la désindustrialisation est bien un transfert de l'activité industrielle vers les pays émergents, que la France consomme donc beaucoup plus de biens manufacturés qu'elle n'en produit, et que donc son appareil productif s'érode. Or sur quoi repose alors la croyance que la prospérité d'un pays se fonde, à long terme, sur la santé de son appareil productif, humain et matériel ? Un pays ne peut-il donc pas rester prospère aussi longtemps qu'il le veut, tout en laissant son appareil productif s'éroder, et en comptant sur les autres pays pour qu'ils produisent ce qu'il consomme ?

Dans un texte précédent j'ai donné les principaux chiffres qu'on considère habituellement comme ceux de la désindustrialisation. J'aborde dans celui-ci toutes ces questions auxquelles ils n'apportent pas à eux seuls des réponses. Ce sera donc le 2ème volet sur 2 de la série :

Les chiffres de la désindustrialisation et ce qu'ils ne montrent pas 

Pourquoi un plan de relance de l'économie française, devrait-il passer par une ré-industrialisation ?

Une première question à laquelle les chiffres habituels de la désindustrialisation ne répondent pas, est celle de savoir pourquoi un plan de relance de la croissance et de l'emploi en France, et de rééquilibrage de notre balance des paiements, devrait passer par une ré-industrialisation.

Cette question porte moins sur ce qui est ou a été, que sur ce qui serait à l'avenir, si l'on essayait de faire ceci ou cela pour relancer l'économie française. C'est pourquoi les chiffres ont du mal à y répondre, eux qui sont des produits de la vie passée ou présente, et qui nous parlent de ce passé ou de ce présent plus immédiatement que de tel ou tel avenir potentiel, si l'on faisait ceci ou cela.

On peut déjà constater que les plans de relance imaginés par plusieurs économistes, passent par une ré-industrialisation. Par exemple celui de Michel Aglietta, qui veut donner à cette ré-industrialisation la forme poétique d'une « croissance verte », ou encore celui de Jacques Sapir, plus terre-à-terre.

On peut aussi trouver à ce passage par une ré-industrialisation, des justifications théoriques, du côté de chez les économistes keynésiens et notamment post-keynésiens, et des justifications empiriques dansl'histoire économique récente de la France.

Les théories keynésiennes tournent beaucoup autour d'une conception originale de ce que peut être un plan de relance. Deux éléments, parmi d'autres surement, de ces théories, sont pertinents par rapport à la question dont on se préoccupe ici : le « multiplicateur keynésien en économie ouverte », et la « loi de Thirlwall ».

Un plan de relance keynésien consiste, par une décision politique, à mobiliser de l'argent pour financer conjointement, un agrandissement de l'appareil productif, et un accroissement de la consommation. Pour que le plan de relance fonctionne, il faut que la consommation supplémentaire, soit celle de la production supplémentaire permise par l'agrandissement de l'appareil productif. La mobilisation d'argent peut se faire, soit en facilitant certains crédits à la consommation ou à l'investissement public ou privé, et donc en facilitant une certaine création supplémentaire de monnaie, soit en mobilisant l'argent épargné, par des impôts ou emprunts, ou en favorisant une modification de la répartition de la richesse en faveur des ménages les moins riches, ayant une plus grande propension à consommer plutôt qu'à épargner.

Le multiplicateur keynésien est alors égal à la valeur de la production supplémentaire suscitée par le plan de relance, divisée par la quantité d'argent mobilisé pour la relance. Quand le multiplicateur est élevé, cela veut dire qu'il faut mobiliser peu d'argent pour avoir un bon résultat en terme de croissance. Quand le multiplicateur est bas, cela veut dire au contraire qu'il faudrait mobiliser beaucoup plus d'argent pour avoir un aussi bon résultat, et qu'à défaut on aura un moins bon résultat. Dans les années 1930, dans sa Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie, Keynes a proposé une manière d'estimer ce multiplicateur dans le contexte d'une économie plutôt « fermée », ne faisant pas beaucoup d'échanges commerciaux avec le reste du monde. Il reprenait en fait les travaux d'un de ses contemporains, Richard Kahn. Selon eux, plus la propension des gens à consommer plutôt qu'à épargner est importante, et plus une quantité donnée d'argent mobilisé aura une grande efficacité.

Les économistes keynésiens ont ensuite essayé d'estimer ce multiplicateur dans le cas d'une économie plus « ouverte », comme la notre aujourd'hui. Une extension particulièrement aboutie du multiplicateur keynésien au cas d'une économie ouverte, proposée autour du début des années 1950, est celle de Richard Goodwin. Au premier abord, le multiplicateur de Goodwin se présente moins comme une extension du multiplicateur keynésien au cas d'une économie ouverte, que comme son extension au cas d'une économie dans laquelle on distinguerait, à la manière de Leontief, plusieurs branches d'activités en interaction. Goodwin se demande quel effet aurait un ensemble de plans de relance, chacun ciblé sur une branche d'activité, sur la croissance de chacune des branches, en tenant compte des interactions entre les branches (telle branche fait telle ou telle consommation intermédiaire qui lui est fournie par telle ou telle autre branche). La généralisation du multiplicateur que Goodwin construit, n'est plus un nombre mais une matrice, elle aussi « multiplicatrice ». Dans le monde des objets mathématiques, les matrices peuvent en effet, comme les nombres, être additionnées, soustraites, multipliées ou inversées. C'est finalement en remplaçant les diverses branches d'activité par divers pays en interaction, qu'on obtient une généralisation du multiplicateur keynésien au cas d'une économie ouverte.

Selon cette généralisation du multiplicateur keynésien, un plan de relance dans le pays sera d'autant plus efficace, que la propension des gens du pays à consommer des biens importés plutôt que produits localement, est compensée par la capacité du pays à exporter, et par l'existence de plans de relance dans les autres pays. Pour qu'un plan de relance fonctionne, il faut en effet que la consommation supplémentaire qu'il suscite, se tourne vers la production supplémentaire qu'il est sensé susciter aussi. Or les consommateurs du pays n'utiliseront pas tout l'argent mobilisé par le plan de relance pour consommer des biens du pays, puisqu'ils ont une certaine propension à consommer des biens importés. Une partie de l'argent mobilisé « fuitera » donc à l'étranger, et une partie de la production supplémentaire risque de ne pas trouver de débouché. Si le pays a une bonne capacité à exporter, et si les autres pays font aussi des plans de relance, un tel débouché pourra quand même être trouvé, dans une augmentation des exportations du pays, suscitée par les plans de relance dans les autres pays.

Dans sa modélisation mathématique, Goodwin fait l'hypothèse simplificatrice que la propension à importer et la capacité à exporter du pays sont constantes (son modèle mathématique serait beaucoup plus complexe en levant ces hypothèses : il deviendrait « non-linéaire »). Mais dans le cas où les autres pays ne feraient pas de plans de relance, ou dans le cas où la capacité à exporter du pays serait trop faible, on peut encore compter sur une réduction de la propension des gens du pays à acheter des biens importés, qui susciterait un report de leur consommation vers les biens du pays, pour compenser la « fuite » d'argent due à l'ouverture de leur économie. On peut remarquer que, dans le cadre d'un plan de relance, une telle réduction de la propension des gens du pays à consommer des biens importés, ne réduirait pas nécessairement la quantité globale de biens importés par le pays : puisque le plan de relance doit avoir pour effet d'augmenter la consommation globale des gens du pays. C'est en fait une nécessité mathématique que, si la consommation globale des gens d'un pays augmente, mais si les quantités de biens qu'ils importent et exportent restent constantes, alors la proportion de biens qu'ils importent se réduit par rapport à la quantité globale de biens qu'ils consomment.

Alors que le multiplicateur keynésien en économie ouverte s'intéresse à l'efficacité de telle ou telle somme d'argent mobilisée par un plan de relance pour susciter de la croissance, la loi de Thirlwall souligne les effets possiblement négatifs d'un tel plan sur les comptes du pays vis à vis du reste du monde. Énoncée à la fin des années 1970 par Anthony Thirlwall, cette « loi » dit que la croissance d'un pays économiquement ouvert aura bien du mal à rester durablement supérieure à un certain seuil, sans que cela conduise le pays à s'endetter de plus en plus vis à vis du reste du monde (et/ou à voir fondre dans un premier temps ses réserves de change), à cause du maintien d'un déficit de sa balance des paiements sur les échanges commerciaux. Ce seuil sera d'autant plus bas que la croissance du reste du monde est basse, et que la propension des gens du pays à consommer des biens importés plutôt que produits localement, est trop importante par rapport à sa capacité à exporter. La justification de la loi de Thirlwall est analogue à celle du multiplicateur keynésien en économie ouverte : la « fuite » d'argent risque aussi d'être à l'origine d'un déficit de la balance des paiements sur les échanges commerciaux, si elle n'est pas compensée d'une manière ou d'une autre.

Ces éléments théoriques trouvent des illustrations dans deux moments récents de l'histoire économique de la France : le plan de relance du gouvernement Chirac en 1975, en réaction à la montée du chômage et à la baisse de la croissance venues avec le « choc pétrolier » de 1973, qui marque la fin des « Trente Glorieuses » ; et le plan de relance du gouvernement Mauroy en 1982, dans la lancée de l'élection de Mitterrand en 1981, avant le « tournant de la rigueur » de 1983. Ces deux plans de relance ne comprirent pas de mesures, visant à réduire la propension des habitants de France à consommer des biens importer, suffisamment énergiques pour permettre que la « fuite » d'argent due à l'ouverture de l'économie française, soit compensée par un report d'une partie de la consommation française sur les biens produits en France. L'accroissement de la consommation de biens importés (notamment manufacturés issus des pays émergents) qu'ils suscitèrent, eut donc pour conséquences un fort affaiblissement de l'efficacité de ces plans de relance en regard de l'argent mobilisé, ainsi qu'un grave déficit de la balance des paiements sur les échanges commerciaux(1).

Un autre problème que rencontrèrent ces plans de relance fut un fort accroissement de l'inflation. En plus des « fuites » en économie ouverte, l'autre grand problème des plans de relance keynésiens, est le risque que l'argent mobilisé par le plan de relance, nourrisse de l'inflation, au lieu de financer un accroissement de l'appareil productif. Les entreprises risquent d'utiliser l'argent mobilisé par le plan de relance (l'augmentation de leurs ventes suscitée par la stimulation des dépenses des consommateurs, ou bien les facilités de crédit), pour augmenter les revenus du travail ou du capital, au lieu d'utiliser cet argent pour agrandir leur appareil productif et accroitre ainsi leur production. Au final si la mobilisation d'argent accroit la quantité de monnaie en circulation sans accroitre la production, cela crée uniquement une hausse des prix.

Les économistes post-keynésiens pensent qu'il est possible de résoudre ce problème de l'inflation nourrie par le plan de relance, par des mesures énergiques : par exemple, négociations sur la répartition de la valeur ajoutée entre revenus du travail, du capital, et investissement, limitation des marges, des profits, des prix de l'immobilier, et d'autres hauts revenus, contrôle que l'argent obtenu grâce à un crédit facilité est bien utilisé pour investir et embaucher des gens, introduction d'entreprises nationales dans certaines branches pour éviter les rentes de monopole, ou autres mesures peut-être.

Et pour résoudre le problème des « fuites » d'argent à l'étranger, un gouvernement qui voudrait, en France dans les prochaines années, réussir un plan de relance keynésien, risque fort de devoir prendre aussi des mesures énergiques, visant à réduire la propension des habitants de France à acheter des biens ou services à l'étranger : droits de douane, dévaluation unilatérale, « taxe carbone », ou usages d'autres instruments protectionnistes.

Pourquoi donc finalement, dans le cadre d'un plan de relance keynésien, une réduction de la propension des consommateurs de France à acheter des biens ou services à l'étranger, devrait-elle s'accompagner d'une ré-industrialisation ? Le graphique suivant peut nous aider à répondre à cette question. Il donne pour l'année 2008, et pour chaque catégorie de biens ou services, la valeur des biens ou services de cette catégorie que nous avons acheté à l'étranger, en pourcentage de la valeur totale des biens et services que nous avons achetés à l'étranger. Ses sources sont l'OCDE (sa base de données STAN) et la Banque de France. C'est en tant que voyageurs, que nous achetons à l'étranger des services d'hôtellerie et restauration. A moins que nous cessions de voyager, les services d'hôtellerie et restauration sont donc, avec les biens naturels de plein air et des sous-sols, les biens ou services que nous achetons à l'étranger sans pouvoir les produire nous mêmes. Ces biens ou services là représentent en tout 27% de nos achats de biens ou services à l'étranger. Restent donc 73% de biens ou services que nous achetons au reste du monde tout en pouvant les produire nous mêmes : biens manufacturés, transports, et autres services (services aux entreprises principalement).

Valeur des biens ou services que nous achetons à l'étranger, par catégories de biens ou services, en pourcentage de la valeur totale des biens ou services achetés à l'étranger, en 2008

Pour réduire notre propension à importer, nous n'avons peut-être pas très envie de réduire notre consommation de services liés à des voyages, ni de biens naturels agricoles ou alimentaires issus du reste du monde, comme des produits exotiques ou des spécialités locales.

On peut par contre envisager que nous réduisions notre consommation de pétrole, mais cette réduction risque d'avoir un effet limité, étant donné que notre consommation de pétrole ne représente pas un si grand pourcentage que cela de nos achats à l'étranger (moins de 14,8%, puisque les biens naturels des sous-sols comprennent aussi les métaux bruts, l'uranium et le charbon), et étant donné aussi que les prix du pétrole risquent d'augmenter à l'avenir, ce qui pourrait annuler l'effet d'une réduction des volumes que nous importons sur leur cout. Une telle réduction de ces volumes consommés n'est pas non plus des plus aisées, rapides et assurées, puisqu'elle suppose d'inventer et produire industriellement des choses qui ne sont qu'à leurs débuts, comme les voitures, camions, engins agricoles ou de chantier, bateaux ou avions, et autres matières substituables au plastique, n'utilisant pas de pétrole.

Un plan de relance devrait de plus nous permettre de revenir au plein emploi, et d'améliorer les revenus du travail les plus modestes. Les 2 à 3 millions de chômeurs actuels de France, et les quelques autres millions de travailleurs aux revenus les plus modestes, retrouvant un emploi et un meilleur revenu, augmenteraient alors leur consommation, notamment des biens et services que nous ne pouvons produire nous mêmes, mais aussi très certainement de biens ou services que nous pouvons produire nous mêmes mais que nous importons. Il deviendrait dans ces conditions, difficile de ne pas augmenter le montant de nos achats de biens ou services que nous ne pouvons produire nous mêmes, et plus crucial encore de réduire notre propension à acheter à l'étranger des biens ou services que nous pouvons produire nous-mêmes. D'autant plus que même dans notre situation actuelle de chômage de masse et d'excessives inégalités de revenus, notre balance des paiements est déjà en déséquilibre.

On peut alors envisager que nous produisions un peu plus nous mêmes les services de transport et autres services aux entreprises, que nous achetons à l'étranger. Mais encore une fois cela aurait un effet limité étant donné que ces services ne représentent pas une si grande proportion que cela de nos achats à l'étranger : 12,1% en tout.

Le fait de produire un peu plus nous mêmes des biens manufacturés qu'aujourd'hui nous importons, apparaît donc comme une manière de réduire notre propension à acheter des biens ou services à l'étranger, préférable ou particulièrement facile par rapport à une réduction de notre consommation globale de biens ou services que nous ne pouvons produire nous-mêmes, et particulièrement efficace étant donné que nos importations de ces biens représentent 60,9% de nos achats de biens ou services à l'étranger.

Une ré-industrialisation n'est donc pas le seul levier par lequel nous pouvons réduire notre propension à importer, et donc réussir un plan de relance, mais c'est surement un levier essentiel.

La désindustrialisation de la France est-elle aussi un transfert de son activité industrielle vers les pays émergents ?

Une deuxième question à laquelle les chiffres habituels de la désindustrialisation, ne répondent pas, est celle des causes les plus immédiates de cette réduction de l'activité industrielle en France. Est-elle principalement l'effet d'une baisse de la consommation (et de l'accumulation) française de biens manufacturés, ou encore d'une amélioration en France des techniques de production de ces biens, permettant d'en produire autant pour moins cher et en mobilisant moins d'emplois ? Ou bien est-elle en grande partie un transfert de l'activité industrielle française vers les pays émergents ?

Cette question a beau être l'objet de disputes, elle n'a dans le fond pas d'intérêt pratique. Aux yeux de ceux qui veulent juste que la situation de la France s'améliore, la seule chose qui compte est de savoir si oui ou non, il est préférable ou même possible, qu'il y ait relance sans ré-industrialisation. Mais on peut quand même se poser cette deuxième question, pour comprendre ce qui nous arrive.

Cette deuxième question est moins complexe que la première, et on peut y répondre en complétant les chiffres habituels de la désindustrialisation, par d'autres chiffres. Il suffit en effet pour y répondre, de calculer le volume de biens manufacturés qui sont consommés (ou accumulés) en France, et le volume de biens manufacturés qui y sont produits. Si le volume consommé est très supérieur au volume produit, alors on peut conclure que la réduction de notre activité industrielle n'est pas principalement l'effet d'une réduction de notre consommation de biens manufacturés, ni d'une amélioration de nos techniques de production, qui nous aurait permis de produire un volume égal à celui que nous consommons, en mobilisant moins d'emplois et pour moins cher.

Le volume de biens manufacturés que nous consommons, est égal au volume de biens que nous produisons, auquel on ajoute le volume de biens que nous importons, et auquel on retranche le volume de biens que nous exportons. Or il est possible de calculer une approximation de ces volumes, à partir par exemple de l'estimation donnée par le FMI des niveaux des prix dans le monde, comme je l'ai montré dans un autre texte. Je montre aussi dans cet autre texte qu'il est possible de calculer, d'une manière relativement simple, une approximation du nombre d'emplois qu'il aurait fallu mobiliser en France, pour produire la différence entre le volume de biens manufacturés que nous produisons, et le volume de biens manufacturés que nous consommons. Selon le calcul que j'ai fait, cette différence s'élève à 2,3 millions d'emplois (en comptant les emplois mobilisés dans d'autres secteurs que le secteur industriel, mobilisés pour produire les biens ou services utilisés comme des consommations intermédiaires par le secteur industriel, lors de son activité de production du volume de biens manufacturés en question). Ce chiffre peut être vu comme une mesure de l'ampleur du transfert d'activité industrielle de notre pays vers les pays émergents.

Dans un texte publié dans la presse il y a quelques temps, Sapir propose une autre estimation intéressante. Il estime l'impact du phénomène des délocalisations lors de la dernière décennie allant de la fin des années 1990 jusqu'à 2008, à environ 1 à 1,2 millions d'emplois perdus (dans le secteur industriel ou dans d'autres secteurs).

Les coûts et profits liés à la désindustrialisation de la France, se répartissent-ils équitablement à tous ses citoyens ?

Une troisième question à laquelle les chiffres habituels de la désindustrialisation ne répondent pas, est celle de la solidarité des français face à ce phénomène.

J'aborde plus longuement cette question dans un autre texte, selon lequel cette solidarité nationale est tristement inexistante : certains profitent de la désindustrialisation, à travers le plus bas prix des biens produits dans les pays émergents, et à travers la meilleure rentabilité des placements et autres investissements directs dans les pays émergents, ces deux choses étant permises par le bas cout du travail là bas. D'autres au contraire pâtissent de la désindustrialisation, victimes du chômage qu'elle maintient (dans la mesure où nous ne pourrons sortir de ce chômage et de la stagnation, sans ré-industrialiser, comme on l'a vu). La désindustrialisation fait même partie d'un phénomène plus vaste, par lequel des pressions à la baisse sont exercées sur les revenus des travailleurs de France les moins qualifiés, souvent ceux dont les revenus sont les plus modestes. Cela encore profite à d'autres, détenteurs du capital des entreprises dans lesquelles ces travailleurs ont un emploi, consommateurs des biens ou services produits par ces travailleurs.

D'autres chiffres que ceux habituels de la désindustrialisation, montrent ou montreraient ces évolutions du chômage, et des revenus réels des français, selon qu'ils soient des travailleurs exposés à la concurrence des pays émergents, encore occupés ou mis au chômage, ou encore des consommateurs non exposés en tant que travailleurs à la concurrence des pays émergents, ou des détenteurs de capital sous ses diverses formes.

La France pourra-t-elle conserver indéfiniment sa prospérité, tout en continuant à laisser s'éroder son appareil productif ?

Une dernière question à laquelle les chiffres habituels de la désindustrialisation ne répondent pas, est celle de savoir ce qu'il y a donc de si malsain, dans le fait pour un pays de consommer beaucoup plus que ce qu'il produit, en comptant sur les autres pays pour qu'ils produisent pour lui la différence, et en laissant dépérir son appareil productif, tant dans sa dimension humaine que dans sa dimension matérielle.

C'est une question à laquelle les chiffres habituels de la désindustrialisation, et peut-être même n'importe quels autres chiffres, pourraient difficilement répondre à eux seuls, car la question porte sur l'avenir à long terme, et car nous sommes facilement influencés par l'éducation que nous avons reçue dans notre enfance, nos valeurs morales et autres « intuitions de bon sens », profondément ancrées en nous, pour y répondre.

Que nous disait par exemple l'histoire de Pinochio, imaginée par Carlo Coloddi à la fin du XIXème siècle, et que quelqu'un forcément nous a raconté quand nous étions enfants ? Méfiez-vous de tous ces « pays des jouets » où il est possible d'avoir tout ce qu'on désire, sans jamais faire d'efforts. Le côté séduisant du lieu n'est qu'une apparence trompeuse, qui masque son côté profondément malsain. Ceux qui s'y « laissent aller » trop longtemps finissent par devenir « des ânes » qui seront peut-être ensuite traités comme des esclaves.

Et la culture dans laquelle nous baignons contient sûrement encore beaucoup d'autres éléments, à même de nourrir en nous cette croyance, que consommer c'est avoir, que produire c'est être, et que la puissance réside dans l'être et non dans l'avoir.

Autre souvenir d'enfance : la fable du Laboureur et ses fils reprise au XVIIème siècle par La Fontaine à Ésope, auteur grec du VIème siècle avant Jésus Christ. Le jour de sa mort, le laboureur, qui s'attendait à ce que ses fils ne travaillent pas assez sur les champs dont ils hériteraient, leur dit qu'il y avait un trésor caché sous la terre d'un des champs. Pour trouver le trésor les fils tournèrent et retournèrent la terre de tous les champs, du matin au soir. Quand vint le moment de la semence, ils comprirent qu'ils avaient pris l'habitude de travailler, que cela avait forgé leurs corps et leurs volontés, et qu'ils avaient rendu la terre plus fertile, et quelques temps après qu'ils aient semé, le blé poussa abondamment et ils purent manger à leur faim. « D'argent, point de caché. Mais le Père fut sage / De leur montrer avant sa mort / Que le travail est un trésor. », conclut la fable.

Plus sérieusement, l'histoire économique, et ses observateurs, économistes influents comme List, ou historiens de l'économie commePaul Bairoch, ont surement beaucoup à dire sur cette question de savoir, si l'appareil productif d'un pays est un fondement indispensable à long terme de sa prospérité.

J'en parlerai peut-être dans un prochain texte...

Notes.

1. En 1994, quelques années après les plans de relance ratés de 1975 et 1982, l'Observatoire Français des Conjonctures Économiques propose dans une étude, une réponse à la question de l'impact du libre-échange sur l'emploi en France. La réponse de l'OFCE est que le libre-échange couterait à peu près 220 000 emplois à l'économie française, en 1992, ce qui est un cout assez modeste, à côté du niveau de chômage très élevé déjà à l'époque.

Dans les notes de ce texte, je décris et critique de manière plus détaillée qu'ici cette étude. Ma conclusion est que l'OFCE fait une erreur, qui se situe au niveau de sa reformulation en termes plus techniques, de la question de l'impact du libre-échange sur l'emploi en France. Pour répondre au citoyen ordinaire qui se pose cette question, l'OFCE simule, à l'aide d'un petit modèle mathématique de l'économie française, ce qui se serait passé dans les quelques mois suivants si, brusquement le 1er janvier 1992, le volume de nos échanges avec l'Asie émergente était retombé au niveau de 1973, « toutes choses restant égales par ailleurs ». L'OFCE utilise donc une méthode de prévision des effets à court terme, d'un changement brusque d'une seule chose, pour se poser une question qui concerne le passé sur une longue période, et qui dépend de nombreux choix politiques lors de cette période. A aucun moment l'OFCE ne se demande quel chemin aurait emprunté l'économie française depuis 1973, si la politique économique menée par les gouvernements français avait réussi à relancer l'économie française, en ayant recours notamment à des mesures énergiques visant à réduire la propension des habitants de France à consommer des biens importés, c'est à dire des mesures protectionnistes, mais aussi éventuellement en ayant recours à d'autres mesures. Dans le cas où une relance notamment basée sur du protectionnisme aurait réussi, et où aucune mauvaise décision n'aurait gâché cette réussite, nous connaitrions aujourd'hui le plein emploi, par définition d'un plan de relance réussi. Le cout en emplois de tout obstacle à la réussite d'un plan de relance, et notamment du libre-échange, est donc la différence entre notre niveau actuel de chômage, et le niveau de chômage associé à une situation de plein emploi. En 1992 déjà, cette différence était bien supérieure à 220 000 emplois.

Samuel sur Le Retour de l'antique esprit de clan.com

Partager cet article
Repost0
10 août 2011 3 10 /08 /août /2011 10:13


 

agence-de-notation.gif

 

Dessin de Martin Vidberg

 

La dégradation de la note américaine : Mesure et utilisation de la mesure

 

Quand on mesure la vitesse d’une voiture l’instrument de mesure prélève un peu d’énergie à la voiture et affiche une valeur : l’énergie est transformée en information Dans ce cas la part d’énergie prélevée est minuscule par rapport à l’énergie totale de la voiture, la mesure ne modifie pas la chose mesurée. De plus l’instrument de mesure repose sur un savoir physique bien établi qui ne prête guère à contestation. Une fois l’information établie, on va prélever à nouveau de l’énergie dans l’environnement de la chose mesurée pour distribuer ou faire circuler l’information, qui est plus ou moins distribuée, et là commencent les éventuelles conséquences : suivant que la gendarmerie a ou non connaissance de ma vitesse.


Quand une agence de notation mesure la future capacité de remboursement d’un état, l’agence prélève dans le système un peu d’énergie (ici de l’argent ) pour effectuer ses calculs : l’agence n’a pas besoin d’une quantité d’argent énorme pour faire ses calculs : la mesure ne modifie pas la chose mesurée : la mesure elle même est neutre. Mais ici l’instrument de mesure ne repose pas sur un savoir physique bien établi, mais sur un savoir économique, et la dite économie n’étant pas vraiment une science, la mesure est peut être :

1/ vraie : la mesure reflète t-elle la réalité ?
2/ juste : les calculs sont-ils entachés d’erreur ou d’approximations empilées les unes sur les autres ?
3/ fondée : les hypothèses de base font-elles l’objet d’un consensus, et sur quels travaux reposent-elles ?

 Pourtant, quand l’agence de notation publie la mesure on observe que la publication de la mesure amplifie la mesure elle même :

1/ si la note est bonne, l’Etat mesuré pourra emprunter à un taux bas et sa note sera bonne à la mesure suivante
2/ si la note est mauvaise, l’Etat mesuré devra emprunter à un taux élevé et sa note sera plus mauvaise à la mesure suivante.

Malgré la faiblesse de la science économique, il y a un donc consensus autour de la mesure : consensus qui repose sur un constat élémentaire : quand on croule sous les dettes on a deux solutions :

1/ annuler la dette : faillite ou banqueroute (ou ses formes déguisées : guerre et hyperinflation) ou encore tuer les créditeurs
2/ les rembourser en se serrant la ceinture et/ou en gagnant beaucoup plus d’argent.


L’histoire enseigne que, sauf exception, l’Etat a presque toujours choisi de « tuer » les créditeurs, soit en les liquidant physiquement soit en les ruinant, et à la place des rentiers modernes, avant de mourir, je proposerais un arrangement. L’histoire enseigne aussi que les rentiers ont toujours cru jusqu’au dernier moment qu’ils pourraient sauver le principal, alors qu’ils s’étaient remplis les poches avec l’intérêt ….. Les rentiers modernes seront-ils plus raisonnables ? Pas sûr quand on voit comment ils se comportent avec la Grèce …

 

Alain Vadet sur le blog de Paul Jorion

Partager cet article
Repost0
9 août 2011 2 09 /08 /août /2011 16:21

 

Curitiba-4-jpeg-copie-1.jpg

 

« N’importe quelle ville dans le monde peut améliorer sa qualité de vie en moins de trois ans ». Jaime Lerner architecte et urbaniste, trois fois maire de Curitiba sait de quoi il parle. Cette métropole de 1800 000 habitants au sud du Brésil a plus que triplé sa population en moins d’un demi siècle et pourtant...


...Dans cet intervalle, elle est devenue une référence en matière de développement durable, grâce à un plan d’urbanisme, un Curitiba Master Plan élaboré dès les années 40 auquel s’est ajouté un système intégré (Rede Integrata de Transport) unifiant l’ensemble des  transports urbains et permettant de rejoindre  n’importe quel lieu de la ville. Ajouté à cela, l’usage du ticket unique depuis les années cinquante (!), ces drôles de tubes où les passagers n’entrent qu’après avoir payé leur ticket (un bon moyen de limiter la fraude) mais aussi, un urbanisme où la densité du bâti est fonction de celle des transports en commun qui l’irriguent, et vous obtenez un taux de fréquentation et de satisfaction des transports en commun (respectivement 85 % et 89 %) à faire pâlir bien des métropoles françaises.  

Alors bien sûr l’histoire de Curitiba ne se limite pas à ces initiatives, pas plus qu’elle ne se  compare à celle des grandes villes européennes. Mais que dire de ces initiatives prises dans un temps où les pays de l’Union se complaisaient dans l’étalement urbain et à la gloire de l’automobile ?


tube-5-jpg.jpgIl aura fallu un demi siècle à Curitiba pour obtenir des résultats que le monde entier lui envie. Alors, de grâce, cessons de croire à la ville de demain, au développement durable, comme d’une démarche qui ferait advenir sans contraintes, où la ville du futur serait accessible à tous, au prétexte que l’on aurait construit nombre de logements sociaux et lignes de transports en commun nouveaux.


A ce niveau d’exigence, c’est bien d’une prise de conscience collective qu’il s’agit de prôner et de faire vivre. La ville du futur ne saurait se faire sans un minimum de considérations altruistes et de concessions réciproques. Ce qui rend la ville vivable est avant tout la possibilité donnée à chacun de se l’approprier. Sommes nous dans cette démarche ? A chacun d’y répondre …

 

Francis Alexis Hammer

Partager cet article
Repost0
8 août 2011 1 08 /08 /août /2011 14:16

 

 

mendiant-photo-5-6768-b4c36-copie-1.jpg

 

 

Le 16 juillet dernier, ont été célébrées à Vienne avec faste les obsèques d’Otto (de) Habsburg, l’héritier de la dynastie qui a régné sur l’empire Austro-Hongrois pendant sept siècles. Qui aurait imaginé, il y a seulement quelques années, qu’une telle cérémonie pût encore être réservée dans la République autrichienne à ce prince déchu, privé de sa particule et longtemps interdit de séjour en Autriche ?


I- DES OBSÈQUES QUASI-NATIONALES

1- Messe solennelle à Stephansdom
 
À partir de 15 heures, la messe d’enterrement en la cathédrale Saint-Étienne – Stephansdom – était retransmise à l’extérieur par écrans géants sur la place comme sur Heldenplatz – Place des héros - l’esplanade de l’ancienne résidence impériale, la Hofburg. Depuis le matin, ils diffusaient en boucle un film qui retraçait la vie du prince disparu.
 
Surtout, un parcours triomphal a été organisé à travers le cœur historique de Vienne qu’encercle le fameux Ring, ce premier anneau de boulevards extérieurs, pour conduire la dépouille du prince à la crypte de l’église des Capucins – la Kapuzinergruft sur la place Neuer Markt – où les Habsburg sont inhumés depuis le 17ème siècle, comme le Kaiser François-Joseph et son épouse Élisabeth, dite Sissi. De Stephansdom à Neuer Markt, en effet, il n’y a pas cinq cent mètres en ligne droite.
 
2- Parcours triomphal dans le cœur de Vienne
 
Les cloches sonnant à toute volée, le cortège funèbre a emprunté les rues les plus prestigieuses de Vienne : le Graben, d’abord à la sortie de la cathédrale, ce luxueux cours piétonnier de la capitale avec sa Pestsäule - la Colonne de la Peste - érigée en 1679 comme une pièce montée ou un cumulus blanc et doré de crème de nuages -, Kohlmarkt, l’avenue qui mène à Michaelerplatz et à la majestueuse entrée de la Hofburg, l’ancienne résidence impériale dans Vienne, couverte d’une coupole aux nervures d’or, et encadrée de deux fontaines, encastrées dans la muraille, que surplombent deux gigantesques statues allégoriques, dont, à gauche, une superbe victoire féminine sur la mer. Traversant la cour de François II, le cortège a gagné ensuite Heldenplatz que le palais baroque embrasse de ses deux ailes courbes déployées, tandis qu’éclataient en hommage des coups de canons. Il en est sorti par l’arc de triomphe, face au quartier des musées et à la grandiose statue de Marie-Thérèse sur le trône encadrée de ses généraux. Il est ainsi passé sous la frise, côté Hofburg, qui porte l’inscription « Justitia regnorum fundamentum  » - la justice est le fondement des royaumes. Il a parcouru ensuite un segment du Ring, interdit à la circulation, en remontant vers l’Opéra, puis a bifurqué à gauche devant le haut lieu de la musique viennoise pour passer au pied du musée de l’Albertina et atteindre enfin la Kapuzinergruft.
 
3- Monarque, Armée, Église et anciens corps constitués en procession
 
La longue procession qui s’est ébranlée vers 17h10, s’est étirée pendant plus d’une heure et demie sous les yeux d’une foule de plus ou moins forte densité selon les angles ou les lignes droites du parcours. Le nombre de 10.000 personnes a été avancé.
 
Une cohorte de soldats en gants blancs, casqués et fusil sur l’épaule, ouvrait la marche lente, frappant en cadence le bitume de leurs brodequins cloutés. Le suivait, au rythme funèbre de tambours, tout ce que l’Autriche peut compter d’uniformes d’ordres ou de confréries divers et de costumes pittoresques régionaux comme ceux du Tyrol. Des groupes venaient même de Hongrie et de Trieste, parties intégrantes de l’ancien empire avant son démantèlement de 1918-19. On se retrouvait transporté en plein 19ème siècle dont les imageries qu’on a présentes encore à l’esprit, s’animaient soudain et redevenaient réalité.
Surtout, précédant le cercueil, couvert du drapeau jaune et noir des Habsburg, qu’une escorte convoyait par chariot monté sur pneus, la hiérarchie nationale de l’Église catholique s’affichait en grande pompe avec une longue théorie de prêtres en surplis blancs sur soutanes noires devant le cardinal-archevêque de Vienne, Christoph Schönborn, coiffé de la mitre et balançant sa crosse au rythme lent de la marche, entouré de prélats vêtus de pourpre et de violet. La famille princière en noir suivait le cercueil de son défunt, les femmes voilées de mantilles. Enfin se pressait, après un nouveau détachement militaire, la masse d’un peuple venu rendre hommage à celui qui paraissait avoir encore été son maître.
 
UN MESSAGE AMBIGU
 
1- La fin d’une époque ?
 
Les amis viennois auxquels on n’a pu s’empêcher de confier son étonnement, se sont voulus rassurants. Pour eux, ces obsèques solennelles dont les médias n’ont pas cessé de parler pendant plusieurs jours, n’étaient que la dernière flamme d’un feu en train de s’éteindre. Ils y voyaient la fin d’une époque, même si monarchistes, conservateurs et traditionalistes avaient cherché à faire de la disparition de l’héritier des Habsburg un événément spectaculaire et pour tout dire publicitaire en faveur de leur représentation archaïque favorite de la société autrichienne.
 
Pour le coup, l’opération aura été réussie : ce qu’on ne lit ni ne voit plus désormais que dans les livres d’Histoire, a été donné en spectacle : une société monarchiste hiérarchisée, organisée arbitrairement en ordres, corporations et confréries avec costumes et rituels qui les distinguent et leur confèrent autorité sur le reste des sujets tenus de se soumettre.
 
2- Ou un avenir donné comme préférable à la mondialisation ultra-libéraliste ?
 
À ces amis qui voyaient en somme ce cortège pittoresque sur la voie publique comme une sorte de Carnaval, on a été tenté, cependant, d’objecter une observation incontestable : la place éminente que la hiérarchie nationale de l’Église catholique y a prise. Cette longue file de prêtres ouvrant la voie à leur cardinal-archevêque, mitre sur la tête et crosse à la main, dans le sillage d’une cohorte de militaires armés et casqués, et juste devant la dépouille d’un prince héritier, ne scellait-elle pas à nouveau l’alliance traditionnelle du trône et de l’autel qu’on croyait révolue ?
 
Et on a hasardé une hypothèse : et si l’Autriche dont on connaît l’attachement profond à ses traditions, montrait par ce passé soudain ressuscité la voie vers un avenir présenté comme une issue préférable à la mondialisation qui est en train de détruire aujourd’hui l’Europe. Cultures originales et niveaux de vie sont aujourd’hui attaqués par les mœurs barbares d’une économie ultra-libéraliste : délocalisations d’entreprises et immigration sont activement encouragées pour comprimer au plus bas les salaires et assurer la fortune d’une minorité de ploutocrates cupides qui ne voient pas plus loin que le bout de leur profit immédiat.
 
Les obsèques quasi-nationales d’Otto (de) Habsburg ne sonnent-elles pas l’alarme ? Si aucune régulation politique ne vient remettre de l’ordre dans la concurrence économique déloyale que déchaîne la mondialisation ultra-libéraliste, les forces traditionalistes et réactionnaires, au sens propre du terme, ne vont-elles pas s’imposer comme un recours au prix d’ une régression culturelle inouïe, mais qui apparaîtrait comme préférable à la jungle de l’ultra-libéralisme mondialisé ?
 
On souhaite se tromper et penser comme ses amis viennois que les obsèques quasi-nationales réservées à l’héritier des Habsburg ne soient qu’un Carnaval d’un autre âge de monarchistes nostalgiques sans avenir. Mais l’Autriche n’a-t-elle pas été récemment la première à voir se développer en Europe un parti d’extrême-droite assez puissant pour imposer à la droite parlementaire sa participation à un gouvernement ? Depuis, d’autres pays ont connu un phénomène comparable. Dès lors, la manifestation politique que l’on a vu se déployer dans les rues de Vienne, le 16 juillet dernier, n’annonce-t-elle pas le retour en force d’une société archaïque qui se présente comme une tentante solution de rechange à la société ultra-libéraliste et mondialisée qui conduit l’Europe à la ruine ?

Paul Villach sur AgoraVox
Documents joints à cet article

mendiant-photo-5-6793-97faa-copie-3.jpg

 

mendiant-photo-5-6794-d3e44.jpg

 

mendiant-photo-5-6802-7cfa6.jpg

 

mendiant-photo-5-6807-48cfd-copie-1.jpg

 

mendiant-photo-5-6814-11836.jpg

 

mendiant-photo-5-6854-15b96.jpg

 

mendiant-photo-5-6835-2caf9.jpg

 

mendiant-photo-5-6838-61ac4.jpg

 

mendiant-photo-5-6839-0af8f.jpg

 

mendiant-photo-5-6841-a4b56.jpg

 

 

mendiant-photo-5-6857-e4f40.jpg

 

 

 


Partager cet article
Repost0
6 août 2011 6 06 /08 /août /2011 06:17

france administrative divisions

 

 

Un guide pratique pour comprendre la réforme des collectivités territoriales a été mis en ligne sur le site du ministère de l'Intérieur.


Ce guide s'adresse aux élus, aux agents publics d'une collectivité ou de l'Etat, aux partenaires de l'action publique locale, ainsi qu'aux citoyens. Ce document apporte des réponses concrètes aux questions que les praticiens se posent et tend à les familiariser à ces nouveaux outils.

Le guide effectue une présentation générale de la loi en explicitant les nouveautés introduites par le texte, notamment la création de la fonction de conseiller territorial, la métropole et le pôle métropolitain, les communes nouvelles, les règles de regroupements des départements et des régions, la clarification des compétences et des financements.
Il présente ensuite sous forme de fiches didactiques les dispositions relatives aux structures territoriales, à l'intercommunalité, aux pouvoirs de police spéciale du maire transférés aux présidents d'intercommunalité, à la mutualisation des services et à la rationalisation des compétences.

Interdiction des financements croisés

A compter du 1er janvier 2015, entrera en vigueur un principe de non cumul de subventions apportées par le département et la région, sauf en cas d'adoption d'un schéma d'organisation des compétences et de mutualisation des services. Une telle disposition permettra de réduire les logiques de guichet auxquelles se
heurtent les maîtres d'ouvrage et les obligera également à présenter au département ou à la région des projets mobilisateurs susceptibles d'obtenir un financement significatif compensant la part qu'aurait pu apporter l'autre catégorie de collectivité éventuellement sollicitée. Dans le même temps, cela permettra à la région et au département de mieux cibler leurs interventions financières, dans le cadre du schéma d'organisation des compétences et de mutualisation des services. Des dérogations sont néanmoins prévues à ce principe de non cumul.


A noter : un glossaire est présent à la fin du guide.

Pour en savoir plus

 

Sur le Moniteur.fr

Partager cet article
Repost0